Transcription
[1 r] Messieurs,
Le but que l’artiste se propose dans son art, doit être sans doute un point de perfection auquel ceux qui l’ont précédé n’ont pû atteindre ; et quant il a été
assez heureux pour y parvenir, il n’a rien fait si son travail ne mérite l’honneur de votre approbation. Si le méchanisme d’une montre ordinaire perfectioné par deux piéces nouvelles, peut m’attirer cet honneur de votre part, je serai assuré,
Messieurs, de l’utilité qui résultera de cette nouveauté pour l’art de l’horloger.
Une des principales causes de dérangement dans les montres en général provient de l’huile des pivots [1 v] de la verge du balancier qui remontant par les palettes est souvent portée à la roue de remontre. C’est donc de cette huile, et de la poussiere qui s’y joint, que vient l’irrégularité de ces petites machines.
Je crois avoir remédié à cet inconvénient dans une montre ordinaire, dont la roue d’échappement et la verge du balancier sont d’une invention nouvelle ; et cependant d’une solidité qui ne laissera rien à desirer. Cette roue d’échappement est platte, elle fait le même effet que celle de remontre dans une montre ordinaire ; et elle n’est sujette à aucune variations en ce que ses vibrations sont toujours égales ; ne peut s’user comme celles dont on fait usage jusqu’ici,
parce qu’elle n’éprouve qu’un trés leger frottement vu la figure et la flexibilité
de ma nouvelle verge de balancier : et c’est de cette figure même que nait l’obstacle qui empèche l’huile de monter et de parvenir à l’échappement.
Si d’après cet exposé, Messieurs, l’ouvrage dont il [2 r] y est question vous paraît mériter l’examen auquel je desire le soumettre, j’aurai L’honneur de vous le faire présenter par la personne qui aura celui de vous remettre cette lettre.
J’ai L’honneur d’être avec un très profont respect, Messieurs Votre très-humble et très obéissant serviteur.
Jean Baptiste Le Roÿ
horlogé a Moscou
à Moscou ce 8 7.bre 1780
[2 v vierge]