Transcription
[1 r] Ce mercredi
J’étais bien sur, Monsieur, qu’on vous rendrait le compte le plus favorable de M. de Beauvisage, mais il ne faut calomnier persone, <pau> pas même les pauvres habitans de Ribemont. Il y a longtems que les Tirans traitent de rebelles les peuples qui ne souffrent pas assez patiement la tirannie, et que les administrateurs <des> de petites places traitent de mutins ceux qui demandent justice. Si l’home en qui vous avez confiance ose citer un fait qui prouve la mutinerie des habitans de Ribemont j’ai tort, mais s’il vous en a imposé sur cet objet il merite de perdre votre confiance. Je sais que M. de Beauvisage traite les [1 v] paysans avec dureté et avec insolence, je sais que l’insolence envers des malheureux manquans de pain et condamnés au travail est une inhumanité infâme, si c’est la ce que l’ingenieur en chef du Soissonais appele fermeté, nous ne parlons pas la même langue. Je sais que M. de Beauvisage après avoir emploié une année à faire une tranchée auprès du Mont d’Origni a emploié l’année suivante à la faire remplir des mêmes terres, ce qui n’est pas preuve d’une grande intelligence. Je sais qu’il a fait condamner les habitans de Ribemont une ou deux fois à des amendes que l’intendant a jugée[s] mal prononcées une [2 r] fois entre autres pour n’avoir pas travaillé à des reparations dans un tems ou les terreins etaient inondès, Je sais qu’il a éte pour la chaussée de Ribemont de trois ou quatre avis différens ; et je n’ai vu à cette variation d’autres causes 1° que les egards de M. l’intendant du Soissonais pour cette comunauté, 2° la pauvreté de la plupart des laboureurs. Elle va en avoir un troisième tort, celui que j’aie osé m’adresser à vous pour elle, mais j’ose vous prier de vous en rapporter au compte que vous rendra M. de Brie, et d’y avoir plutot |égard| <qu’aux> qu’au commentaire que l’ingénieur de Guise dictera à l’ingénieur en chef.
[2 v] Je n’ai <pas> encore rencontré persone qui se soit plaint de M. de Brie on dit seulement qu’il est trop humain, qu’il compte trop les homes pour quelque chose, et à l’exception de l’ingénieur en chef et du piqueur de Guise qui ont d’excelentes raisons pour cela je n’ai encore vu persone qui ne rendit <au> à M. de Beauvisage la même justice que moi.
Le subdélégué de Ribemont dont on vous parle est mon oncle, il n’a bien voulu se charger de cette place qu’à condition que jamais il ne serait chargé d’aucune partie de l’administration ou il pourrait y avoir des actes de rigueur, voila pourquoi il ne comandera jamais aucune corvée.
J’ai l’honeur d’être avec l’attachement le plus respectueux, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Le Mis de Condorcet.1Paraphe soulignant.