Transcription
[1 r] Messieurs
J’ai eu lhonneur de <p> vous presenter le 241Lire 17
.
Mars de l’Année derniere un hemisphere austral avec un memoire pour soumettre le
tout à votre jugement. La Compagnie voulut bien me nommer pour Commissaires M.rs De la Lande et <J> Cassini fils. Le Suffrage avantageux que ces Messieurs
consignerent dans leur rapport du 292Lire 24
. du meme mois,
m’encouragea à terminer cet ouvrage entrepris et éxécuté sous les yeux
de Mr Le Duc de Croÿ, mais qui
pour lors N’etoit pas encore porté à la perfection dont il etoit susceptible. De
nouvelles decouvertes faites par M.rs
Marion, de Surville,
Croizet, et de St
Allouarn devoient s’y joindre à celles que nous avoient deja procuré
M.rs Cook, de Bouganville et de
Kerguelen.
Ces routes des Navigateurs françois et anglois tracées sur cette Carte avec la
plus grande exactitude, Nous font voir ce qui reste encore à parcourir pour
connoitre entierement cette partie Australe de notre Globe ; et que n’avons-nous
pas à esperer du zele intrepide avec lequel M.r de Kerguelen et M Cook sont
retournés pour augmenter ces decouvertes ?
Ce cap de la Circoncision de M.
Bouvet, ces isles desertes vues par M. Marion, ce
cap St Louis reconnu par
M.r de Kerguelen, et cette
chaine de glaces qui se trouvent dans les environs du même parallele [1 v] sont des indices d’un continent qui, renfermant le pole Austral, paroit opposé à
une mer circonscrite dans la partie boreale de Notre globe par les cotes
septentrionales de notre continent et par la partie nord des terres arctiques de
l’Amerique.
Le tems viendra et peut etre n’est-il pas eloigné que nous connoitrons ces deux
extremités de la Terre. La partie boreale a toujours été <le but> l’objet
des tentatives des Navigateurs europeans pour decouvrir tant à l’est qu’à l’ouest
un passage qui put communiquer dans la mer du Sud.
J’ai lu l’an passé à la compagnie un essai sur ces Navigations dans la mer polaire
Arctique, accompagné d’une Carte dont la perfection sembloit dependre de la
reussite du voyage de M.r Phips
que nous savons n’avoir pu passer au dela de 81.d 39’
de latitude. Quoique cette tentative paroisse avoir été inutile et que l’on soit
persuadé en Angleterre que le voyage à travers le3Ce
mot aurait dû être barré. ce pole est veritablement impossible, il ne
faut point desesperer qu’il ne se trouve quelque circonstance heureuse qui fera
franchir les obstacles que l’on y a rencontrés.
Je me propose d’avoir lhonneur, Messieurs, de presenter dans peu de tems à la
compagnie cette carte polaire arctique perfectionnée d’après les nouvelles
connoissances que les Russes nous ont procurées au Sud du detroit de Beering, et
de lire un memoire sur la situation respective des pays de l’Asie et de l’Amerique
qui terminent le nord de la mer du Sud. Ce memoire [2 r] pourra etre
regardé comme un supplément à celui que j’avois soumis au jugement de l’Academie
et pour lequel M.rs Pingré et Jeaurat avoient été nommés
commissaires. Ce nouveau memoire sera accompagné d’une Carte dont il presente les
fondemens et les autorités et dans laquelle je cherche à concilier toutes les
decouvertes |tant| authentiques <[... ?] même> que douteuses ou
soupçonnées que nous avons dans ces parties, et à determiner l’etendue de la mer
qui separe le Kamtchatka de la Californie ; en attendant que de nouveaux voyages
et des observations astronomiques confirment ou rectifient ce que je n’ai pu que
conjecturer par des combinaisons particulieres.
Daignés, Messieurs, agréer lhommage que j’ai lhonneur de vous faire en vous
presentant quelques exemplaires de cet hemisphere Austral pour être deposés dans
les portefeuilles de votre bibliotheque. L’Accueil favorable avec lequel vous avés
bien voulu <agréer mes f> recevoir mes foibles essais est pour moi un
puissant motif d’emulation. Je ne cesserai de saisir les occasions de vous
temoigner le desir que jai de pouvoir partager les egards que vous accordés à tous
ceux qui, selon l’etendue de leurs talens, contribuent aux progrès des
Connoissances humaines. L’estime des Savans n’est point suspecte ; Puissai je
meriter et obtenir la votre, Messieurs, et mes vœux seront remplis.
Robert de Vaugondy4Paraphe bouclé.
ce 4 Mai 1774
[2 v vierge]