Transcription
[1 r] Monsieur le Marquis
Mr de Ratte ma fait part de la lettre quil a recu de vous au sujet de mon memoire sur la voix des oiseaux. Cest le premier travail que je presente en ce genre, et je ne crois certainement pas quil soit exempt de deffauts ; mais je ne lavois pas cru denué de faits et d’observations personnelles et jen <jugois> jugois par la compilation de mon journal que jai sous les yeux et ou jai pris les materiaux de ce memoire. Jai vu par moi meme touttes les choses dont je donne lassertion. Ce meritte, celui de lobservation personnelle, est celui que je cherche a me donner et dans cette vue jecris tous les jours depuis plusieurs années tout ce que mes recherches me presentent en histoire naturelle. Je ne dois pas penser que m.rs les commissaires que lacademie des sciences a bien voulu me donner eussent preferé la compilation seche et ennuyeuse de mon journal que jai redigée, et qu’un stylle plus soigné soit un deffaut lorsquon ecrit en histoire naturelle et lorsquon ecrit apres [1 v] monsieur de Buffon. Vous ne consentiriés pas vous meme monsieur a otter aux sciences cette partie d’agrément et d’utillité, et a retrancher de votre stylle ce genre dexpressions qui transmet exactement les idées, et l’interest que presentent les objets. Celui quon prent a etudier la nature dans elle meme ne doit il pas etre conservé dans les ouvrages de ce genre, et lhistorien sera-t-il fidelle sil est froid et maussade dans cette partie des sciences qui est la partie dagrément, de plaisir, et de luxe des connoissances humaines.
Je vous prie monsieur de permettre que je ne retire pas mon memoire, et je vous demande instamment dengager messieurs les commissaires a me donner leurs observations détaillées sur cet ecrit telles quils pourroint [sic] les faire a un eleve attentif et docille dont ils voudroint [sic] regler le travail et fixer les idées. Veuillés bien monsieur leur engager tout mon dévoument et toute ma reconnoissance. Je nai pas lhonneur de les connoittre. Javois ecrit a Mr d’Aubanton imaginant quil seroit mon juge. Je n’en ai pas eu de reponse. Je travaille a un asses grand ouvrage sur lhistoire des oiseaux [2 r] du Languedoc ; il mest important de determiner dapres des opinions respectables quelles doivent etre lexposition des faits que jobserve et la manierre den traitter lensemble et ce motif mengage a sollicitter par votre moyen avec instance aupres de messieurs les commissaires cette critique détaillée qui renferme lapprobation <et> ou la censure de chaque objet en particulier. Une assertion generalle et vague ne peut donner que des pensées incertaines et ne presente point de regle sure pour diriger sur des choses deja faittes leponge qu’on y traine a regret et pour dispenser dy avoir recours a lavenir.
Jai lhonneur detre avec respect Monsieur le marquis Votre tres humble et très obeissant serviteur.
Touchy1Signature suivie de deux points entre deux traits parallèles obliques.
ecuyer, fauxbrg St Guillem
Montpellier, 14. juin 1784.
[2 v vierge]