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Notice
Identification et lieu de conservation
IDC952
TitreMALESHERBES à CONDORCET - 30 mars 1780 (Paris, Archives de l’Académie des sciences, pochette de la séance du 5 avril 1780)
Nature du documentOriginal
Lieu de conservationParis, Archives de l’Académie des sciences
Cotepochette de la séance du 5 avril 1780
Intervention(s)
Expéditeur(s) et destinataire(s)
Scripteur(s)
Instrument d’écriturePlume trempée dans l’encre noire
Dates
Date indiquée par le scripteur30. mars 1780
Datation30 mars 1780
Lieux
Lieu d'écriture indiqué par le scripteurMalesherbes
Lieu d'écriture rétabli ou normaliséMalesherbes
Lieu d'écriture indexé
Lieu de destination rétabli ou normaliséParis
Lieu de destination indexé
Note(s) lieu(x)

Région parisienne

Papier et cachet
Description sommaire du papier

Cahier de 4 bifeuillets in-4° non reliés, vergé légèrement azuré, filigrané

Textes

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Transcription

[1 r] A Malesherbes le 30. mars 1780.

L’académie, Monsieur, me fait bien de l’honneur de vous avoir prié de me consulter sur l’affaire des arts qui a été traitée en mon absence.

Je connois les Directeurs de la Societé Typographique de Neuchatel et je m’interesse à eux, mais cet interêt ne doit entrer pour rien sur la décision de l’affaire sur laquelle voici mes reflexions puisque vous me les demandés.

Dans le Droit, des Libraires Etrangers ne peuvent pas demander la libre introduction en France d’un Ouvrage dont la plus grande partie est copiée sur un ouvrage françois pour lequel il existe en France un privilége, cela est incontestable. Aussi je [1 v] crois que ce n’etoit pas la demande originaire [sic] de ces Directeurs, et qu’ils ne s’y sont portés qu’après avoir desesperé de réussir dans d’autres propositions.

Mais a considerer l’affaire sous un autre point de vüe qui est celui du bien public, il y a plusieurs observations à faire.

L’entreprise faite sous les auspices de l’académie offre un grand avantage pour le public que n’a pas eu jusqu’apresent celle de Neuchatel qui est de donner chaque art séparement ensorte que chaque artiste puisse acheter ce qui l’interesse. Sans cela on ne travaille que pour l’amusement de quelques Lecteurs et pour la gloire. Mais pour le bien de la chose les Collections volumineuses et cheres qu’il n’y a que les gens riches qui achetent et que leurs amis [2 r] qui lisent ne servent à rien. Aussi quand j’en ai parlé aux Neuchatelois chés eux et à Paris, je leur ai toujours conseillé comme la premiere de toutes les conditions qu’ils auroient à proposer, celle de fournir comme en France leurs articles séparement. L’utilité de ce débit par feuilles separées est évidente, et j’en suis encore plus frappé qu’un autre parce que j’en ai vu des effets. J’ai trouvé des Cahiers de nos arts chés des ouvriers jusqu’en Frise, et en France j’en ai trouvé dans un village qui avoient servi à un Marchand intelligent pour établir chés lui une Manufacture qui y etoit inconnue.

Mais d’une autre part l’entreprise de Neuchatel a deux grands avantages sur la notre.

Le premier est qu’ils sont à portée de [2 v] nous donner les procedés des arts connus chés eux et dans toute l’Allemagne dont ils savent la langue, et avec laquelle ils ont des relations continuelles, ce que nous n’avons point fait et ce que vraisemblablement nous ne ferons jamais dans notre Collection. Or dans cette entreprise c’est jusqu’apresent la France qui a decouvert tous ses secrets aureste de l’Europe sans réciprocité. Cela est très noble de notre part sans contredit. Il y a des gens qui vous diroient que cela n’est pas d’une bonne politique. Pour moi je n’ai point cette politique sombre et jalouse ; je crois que nous devons faire ce qui est le bien commun de l’humanité, sans être arrêtés par la crainte que des puissances rivales n’en profitent. Cependant il seroit juste que nous tirassions aussi leurs secrets. [3 r] L’entreprise de Neuchatel en est un moyen, et c’est un grand motif pour la favoriser de peur que par dégoût ils ne l’abandonnent. L’avantage que la France retirera de la publication de quelques procedés qui lui seroit inconnus, compensera bien le tort que fera une Edition etrangere aux Editions françoises.

L’autre avantage de l’entreprise de Neuchatel est le bon marché. Le S.r Moutard nouvel Entrepreneur offre de baisser le prix nonseulement des Arts dêja imprimés et qui restent invendus dans son Magazin, mais de ceux qu’il fera par la suite. Puisqu’il le peut, il est bien étonnant que ses predecesseurs ne l’ayent pas fait, et même je suis étonné que l’académie n’y ait pas veillé et ne les y ait pas obligés. Mais sommes nous bien surs que [3 v] le S.r Moutard tiendra cet engagement. Je crois me rappeller que dans l’origine les S.rs Dessaint et Saillant devoient donner deux Editions a la fois, une infolio pour les Curieux, et une inquarto avec moins de faste et moins de frais pour ceux qui preferent le bon marché. Ils n’en ont rien fait ; et aujourd’hui je ne vois pas dans le Traité du S.r Moutard que vous m’avés communiqué qu’il prenne le meme engagement.

Ce sont ces differentes reflexions jointes à ce que les precedens Libraires se refusoient à remplir les conditions de leur engagement, qui m’avoient fait penser que les Libraires de Neuchatel pourroient s’arranger avec les Libraires de France qui prendroient l’entreprise abandonnée par le S.r Saillant, aux conditions qu’il se feroit à l’avenir une [4 r] Edition inquarto entrant librement en France, et qu’on en vendroit les articles séparement comme ceux de l’Edition infolio.

C’est ce que je pensois quand j’ai été à Neuchatel ; j’esperois encore que cela s’arrangeroit le jour d’une séance de l’académie où j’assistois et où on en parla. Je n’entendis point dire alors que ce fut du consentement de l’académie que le S.r Moutard eut traité avec le S.r Saillant. On en parla comme d’un marché fait entre eux <de leur seul consentement>1Barré par Malesherbes. et je ne crois pas qu’ils fussent en droit de le faire sans le consentement de l’académie.

Il n’en est pas d’un ouvrage qu’on compose tous les jours comme d’un ouvrage achevé. Celui qui a acquis le privilege d’un ouvrage tout fait, a la pleine proprieté de ce privilége ; mais le privilége d’un [4 v] ouvrage qui se compose, doit toujours être resilié quand les Auteurs et les libraires ne s’accordent pas. En effet les Libraires n’auroient pas de moyens pour obliger les auteurs à travailler, et les auteurs ne pourroient pas nonplus avec justice forcer les Libraires à executer leurs conditions si le Manuscrit quils leur remettroient rendroit ces conditions impraticables. Les Libraires en sont bien persuadés puisque le S.r Saillant malgré son traité s’est rendu difficile sur l’impression de quelques arts qui lui etoient offerts et dont il trouvoit l’Edition trop dispendieuse. Dès lors l’académie à [sic] été en droit de regarder le Traité comme dissout, et par la même raison elle ne pouvoit pas être obligée à accepter le Cessionnaire du Privilége [5 r] qu’il plaisoit au S.r Saillant de lui presenter.

Dans cet etat j’aurois été d’avis qu’on acceptât un autre Libraire, qu’en s’assurant ou qu’il s’arrangeroit avec les Libraires de Neuchatel ou d’autres, ou que lui même de son fond procureroit au public le double avantage qu’il trouve dans l’Edition de Neuchatel pour le bon marché et pour les publications des Arts Etrangers.

Les choses ne sont plus les mêmes puisque le Comité de l’academie a agréé le projet de Traité avec le S.r Moutard.

J’ai lu les Mémoires des deux parties que vous m’avés communiqués au sujet des propositions faites par les Libraires de Neuchatel et ceux de Paris, et j’y ai vu l’offre faite par le S.r Moutard de se vendre réciproquement une moitié de leur Edition.

[5 v] Je ne sais si cette proposition vous a paru specieuse. Je vous avoue qu’elle m’a paru ridicule. L’Edition de France est vendue à tous ceux qui veulent faire les frais d’une Edition si chere, ensorte que ce qui reste chés les Libraires est un papier à vendre au Rabais. Celle de Neuchatel au contraire seroit d’un grand débit si l’entrée en etoit permise en France. C’est dans cette position que le Libraire de Paris offre d’acheter un effet dont le débit sera sur en en vendant un dont il ne <seroit> scait2De la main de Malesherbes. plus que faire : car aprés tout rien n’est plus clair que le débit futur de notre Edition. Ceux qui ont acheté la Collection jusqu’apresent continueront d’acheter ce qui paroitra pour completter leur Exemplaire, et ce sera toujours aux Libraires de Paris qui les ont fournis [6 r] jusqu’apresent qu’on s’adressera. Mais personne ou presque personne n’achetera chés les Libraires de nouveaux Exemplaires, parce que bientôt ils se vendront moins cher aux Inventaires que chés eux. Il est donc certain que les Libraires de Neuchatel ne trouveroient pas à vendre ce qu’ils auroient acheté de ceux de Paris, et que ceux ci vendroient trés bien ce qu’ils auroient acheté de ceux de Neuchatel.

Pour resumer tout ceci, Monsieur, il me parroit [sic] difficile de faire la Loi à Moutard puisque son projet de Traité est agréé par le Comité ; mais je vois [sic] que le public y perdra, 1.° en ce que le public de France ne pourra avoir la Collection des arts qu’a un plus haut prix que les Etrangers, 2.° en ce que nous aurions pu exiger de [6 v] ceux qui font l’Edition inquarto de vendre leurs Cahiers séparément, aulieu que nous ne pouvons rien éxiger d’eux quand nous ne leur accordons rien.

J’ajoute que si cette Edition de Neuchatel se continue malgré la défense de la laisser entrer en France, c’est une preuve qu’elle y entre toujours en Contrebande, car c’est principalement en France qu’on vend un Livre françois. Mais si les Libraires de Paris venoient à bout de l’empêcher efficacement, il en resulteroit que cette entreprise seroit abandonnée et que nous y <perdrons> perdrions3Correction qui est peut-être de Malesherbes. ce que nous en pouvons espérer pour la communication des Arts Etrangers. C’est pourquoi j’aurois désiré qu’on trouvât un Libraire françois qui <[... ?]> s’arrangeât avec ceux de Neuchatel non pas pour [7 r] se vendre réciproquement ce qui est déja fait, ce qui n’est pas proposable par la raison que je vous ai dite, mais pour continuer l’entreprise de concert, en imposant aux Neuchatelois deux conditions, l’une de debiter à l’avenir séparement leurs Cahiers comme ceux de l’Edition françoise, l’autre de donner tous les ans une certaine quantité d’arts ou au moins <de> des4Idem. procedés qu’on ne pratique pas en France.

Je doute que cela soit possible apresent avec le S.r Moutard, car il me paroit par les mémoires réciproques qu’il y a déja de l’aigreur entre les parties ce qui rend un acte de societé impraticable.

Aureste, Monsieur, je vous ai donné mon opinion à laquelle je ne suis pas plus attaché que je ne dois l’être et que je soumets [7 v] toujours comme de raison à la décision de l’académie.

Vous connoissés l’attachement avec lequel j’ai l’honneur d’être, Monsieur, Votre très humble et très obéissant serviteur.

Malesherbes

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