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Notice
Identification et lieu de conservation
IDC2485
TitreMarc Antoine Louis CLARET DE LA TOURRETTE à CONDORCET - 10 août 1774 (Berlin, Staatsbibliothek, Darmstaedter, Lb 1770 (2), [pièce n° 1])
Statut éditorialLettre retenue
Nature du documentOriginal
Lieu de conservationBerlin, Staatsbibliothek
CoteDarmstaedter, Lb 1770 (2), [pièce n° 1]
Intervention(s)
Expéditeur(s) et destinataire(s)
Instrument d’écriturePlume trempée dans l’encre noire
Dates
Datation10 août 1774
Papier et cachet
Description sommaire du papier

Deux bifeuillets in-4° enchâssés, vergé écru, filigrané

Textes

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Note sur l’établissement du texte : nous donnons en bas de page de la transcription les variantes jugées significatives que présente le brouillon de cette lettre.

Transcription

[1 r] Lyon 10 aoust 1774

J’espere que vous voudrés bien m’excuser, monsieur, si j’ai differé aussi longtems de répondre à la lettre que vous m’avés fait l’honneur de m’écrire, le 17 juillet dernier. J’etois à la campagne, lorsqu’elle est parvenue ici. À mon retour, pour me conformer à vos intentions, j’ai consulté plusieurs de mes confreres, et j’ai voulu les consulter séparément, afin de ne pas donner, au projet dont il s’agit, une publicité qui s’écartoit de vos vues. Telles sont les raisons d’un délai, qui s’accordoit mal avec l’empressement que j’ai de vous témoigner combien je suis sensible à la confiance que vous m’accordés.

Ce que je vais avoir l’honneur de vous dire, monsieur, est donc le résultat de l’avis des principaux membres de notre académie. Ils se sont tous réunis pour louer, avec transport, un projet dont le but est l’avancement des sçiences, et dont l’exécution feroit dautant plus d’honneur à votre illustre académie, qu’il seroit plus honnorable pour les académies des provinces. Que d’éloges ne doit-on pas, en particulier, à votre zéle, Monsieur, et au courage avec lequel vous vous imposés volontairement un surcroît de travail, dans les fonctions multipliées d’une place importante, à laquelle vous avés été déja appellé par la reconnoissance, pour les avoir remplies avec un brillant succès, avant même qu’elles fussent pour vous, un devoir !

Rien ne seroit sans contredit, plus avantageux et plus flateur, pour les [1 v] académies des provinces, qu’une association à la métropole, qui, en adoptant leurs productions, en les publiant à la suite des siennes, en appellant à elles les membres qui les composent, repandroit sur ces corps, une partie de sa gloire. Mais on ne peut se dissimuler que ce projet ne souffre plusieurs difficultés. Je vais indiquer celles qui ont le plus frapé mes confreres ; je proposerai ensuite les modifications qu’ils ont approuvées, et qui me paroissent tendre au même but.

Une association d’un corps, comme celui de l’académie des sçiences de Paris, avec les académies des provinces, ne peut guerres être envisagé[e] que sous un rapport a peu près semblable1Brouillon (f. 2v) : que sous un rapport semblable. à celui qui se trouve, entre les juges d’apel, et les juges de premiere instance. Or quelque soit la supériorité de la premiere, l’indépendance est pour les autres d’un prix inestimable. Tout ce qui pourroit altérer de près ou de loin, cette indépendance, effaroucheroit les esprits. Sans doute, on ne peut pas ménager leur délicatesse, plus que vous l’avés fait, monsieur, dans l’exposé du projet ; mais il est si naturel d’être inquiet, lorsqu’il s’agit de la liberté ! Dailleurs vous sçavés combien il est difficile de réunir 40 voix, lorsque l’évidence n’est pas entiere. Or il faudroit ici l’unanimité des suffrages. Chacun a sa maniere d’envisager les objets ; les uns craindroient pour cette liberté, si chere aux gens de lettres ; ils croiroient qu’ils vont devenir tributaires, et leurs officiers substituts ; d’autres verroient, avec peine, des ouvrages, approuvés par leurs corps, rejettés par un jugement en dernier ressort. Enfin si ces inconvénients ne se manifestoient pas dans les premiers instants de l’aggrégation, qui peut répondre que, dans la suite, des esprits entreprenants, moins sensibles que Vous, monsieur, à la vraie gloire des sçiences, qui nait au sein de la tranquillité, [2 r] ne vinssent troubler l’harmonie, de qui seule on pourroit attendre ici quelqu’avantage ?

Voila les doutes que peuvent élever les académies des provinces. L’academie des sçiences ne trouvera-t-elle pas aussi des obstacles personnels ?

Premierement, les académies des sciences, établies dans les provinces, étant aussi multipliées qu’elles le sont, celle de la capitale ne sera-t-elle pas effraiée d’accorder l’entrée à ses séances, à tous les membres qui les composent ? N’en résultera-t-il pas plus de bruit que de profit ?

Il y a plus, un privilége indistinctément accordé à tous, excitera peu d’emulation dans ceux qui en sont véritablement dignes ; l’objet sera manqué.

Enfin l’académie de Paris posséde déja, ou peut acquérir, dans les provinces, des correspondans utiles, qui ne tiennent à aucun |autre| corps littéraire du royaume. Ce qui, jusqu’à ce jour, formoit un objet d’ambition pour les sçavants des provinces ou pour les amateurs instruits, en affoiblisant leur considération, perdra son mérite à leurs yeux, dès qu’il y aura foule, et surtout dès que l’académie admettra un aussi grand nombre de correspondants, sur la foi d’autrui, et sans pouvoir vérifier le choix. Ne sera-t-elle point dans le cas de dire alors... inopem me copia fecit.

De plus grands obstacles naissent encore de la constitution même des académies des provinces, et de celle de l’académie de Paris.

Les plus considérables, dans les provinces, au nombre environ de quinze, embrassent non seulement les sçiences, mais aussi les belles-lettres, et la plûpart y ont ajouté les arts. Pour vous donner, Monsieur, une idée de cette constitution, je joins ici un [2 v] exemplaire de nos réglements et la liste de nos académiciens.

L’académie des sçiences pourroit-elle donc se proposer une véritable aggrégation avec ces corps mixtes, qui embrassent des objets qui lui sont étrangers ?

Quant à ces académies, elles sont classées, comme la notre, ou ne le sont pas. Dans le premier cas, divisera-t-on le corps, pour n’associer que la portion qui a les sciences pour objet ? Cela seroit absolument contraire à leurs réglements ; l’autre portion seroit en droit de s’y opposer. Ces réglements veulent expressément, et très sagement, que les deux ou les trois classes, ne forment qu’un seul et même corps, indivisible, sans préséance, sans distinction, fournissant alternativement un directeur, et n’ayant qu’un même intérêt.

On a pensé que les villes de provinces, quelque considérables qu’elles fussent dailleurs, ne sçauroient fournir assès de sujets pour composer plusieurs académies ; on les a donc réuni[e]s ; mais pour maintenir l’émulation sans jalousie, il a été nécessaire de mettre une égalité parfaite entre les sujets de différents ordres, qui les composent. Or l’aggrégation, dont il s’agit, y porteroit nécessairement atteinte ; il se pourroit qu’elle excitat des jalousies ; il en naitroit des divisions, puisqu’on auroit à discuter des intérets qui ne seroient <qui ne seroient>2La Tourrette a barré ce deuxième segment, copié par erreur (d’après son brouillon) une seconde fois. pas communs, &c.

Ces inconvénients se multiplieroient encore davantage, dans les académies qui ne sont pas classées, où chaque membre est libre de choisir ses sujets d’étude, où il peut en changer dès qu’il lui plait, &c.

Enfin, Monsieur, une derniere réflexion, qui n’est peut-être pas sans fondement, c’est qu’il se peut que le gouvernement, lui même, voye d’un oeuil inquiet, se former cette espéce de ligue générale, quoique purement littéraire. Bien loin de s’assurer [3 r] une nouvelle protection, pour les académies, de la part de l’administration, peut-être lui donneroit-on de l’ombrage, en se réunissant ainsi en une espéce de corps, dont les membres dispersés pourroient se rapprocher au besoin.

Peut-on lever tous ces obstacles, et parvenir au[x] mêmes vuës, par des voies simples et faciles ? Je le pense, et voici nos idées. Si l’academie roy. des sciences les adoptent, je ne doute pas de l’empressement avec lequel les académies de provinces s’honnoreront de la seconder3Brouillon (f. 4r) : je ne doute pas que celles des provinces s’empressent de la seconder..

Que L’académie des sçiences ait, dans chaque académie de province, dont l’objet d’étude est le même, deux ou plusieurs correspondants. Parmi les correspondants regnicoles, un grand nombre tient aux académies, établies dans les lieux de leurs domiciles, desorte que la pluspart de ces compagnies en comptent déja plusieurs au nombre de leurs membres ; <quand> quant à celles qui n’en ont point, ou <dont le nombre ne paroitroit pas> qui paroitroient n’en avoir pas un nombre suffisant, il lui sera facile d’y suppléer en peu de tems4Brouilllon (f. 4r) : quant à celles qui n’en ont pas, dès que l’académie le desirera, il lui sera bien facile de s’y en procurer un nombre proportionnel à l’etendue du corps.

Au moyen de ces correspondants, attachés aux deux compagnies, le lien est trouvé ; il ne s’agit plus que de le resserrer, en les employant utilement ; et en interessant leurs corps particuliers, à remplir les vues du projet.

L’objet est de publier, chaque année, un volume des Sçavants étrangers, dans lequel soient insérés les travaux des académies des provinces, relatifs aux sçiences, &c.

Lorsqu’on aura lu, dans une de leurs assemblées, quelque mémoire, digne d’entrer dans le recueil, les correspondants de l’académie de Paris seront chargés de demander à l’auteur, s’il souhaite que son ouvrage y soit inséré. Dans ce cas, l’auteur sera [3 v] tenu de demander l’agrément de sa compagnie ; et le secretaire perpétuel de celle-ci, inscrira, à la fin du mémoire, l’extrait du régistre, par lequel il paroitra qu’elle a consenti à sa publication.

Sous cette forme, le mémoire sera addressé à M. Le secretaire perpétuel de l’académie de Paris, qui le fera insérer dans le Premier volume qui paroitra, avec <ce> le titre suivant... Mémoire de M.r N. N. sur... , lû le... dans une séance particuliere de l’académie de Lyon, imprimé du consentement de cette compagnie.

Par là, L’académie des sçiences de Paris, renonce au droit de rejetter ou de ne donner que par extrait, les mémoires qui lui seront addressés, mais l’attache de l’académie de Lyon, étant énoncée à la tête du mémoire, celle ci sera circomspecte [sic] sur le choix, et en demeurera responsable aux yeux du public.

Je ne sçai[s], Monsieur, si j’ai bien saisi l’esprit de votre projet, mais il me semble que ce parti remplit touttes vos vues, et prévient tous les obstacles.

Le receuil de l’académie des sçiences devient réelement le dépot du progrès des sçiences, dans le royaume. Les mémoires des academies des provinces, dignes de voir le jour, mais souvent trop peu nombreux pour pouvoir <en> former des receuils, si ce n’est après un espace de tems qui leur feroit perdre tout le mérite de la nouveauté, ne restent plus enfouïs dans des portefeuilles, et paroissent dès leurs naissances. Leurs auteurs jouissent de la gloire qui leur appartient ; les académies, pour les quelles ils ont travaillés [sic], partagent cette gloire, en conservant toutte leur indépendance ; [4 r] elles envoient des tributs à la métropole, mais volontairement, librement, et sans se mettre dans le cas du reproche, si elles y manquent.

D’un autre coté, nulle division de classe à classe, dans l’intérieur de ces corps. L’égalité est maintenue ; les distinctions sont purement personnelles ; elles appartiennent aux auteurs, comme de raison.

Ceux ci conservent également une entiere liberté. S’ils ont quelques motifs particuliers de faire imprimer séparément leurs ouvrages, on ne peut les forcer de les envoyer au dépot général ; mais leur propre gloire les y invite, et il est aisé à l’académie des sçiences, de les déterminer encore par une récompense flatteuse. Qu’elle promette des lettres de correspondance, à tout académicien des provinces, qui aura fourni deux ou trois mémoires, avoués de leurs compagnies. Elle excite par là, l’émulation de l’académie et de l’académicien. Elle ne déroge point à ses anciens usages ; elle ne fait que les étendre. Cette nomination peut être faite, comme par le passé, sur un rapport de commissaires, &c.

Ce moyen me paroit un des plus sûr[s], pour le succès du projet. Il est cependant encore une voie, au moyen de laquelle l’académie de Paris peut exciter le zéle de celles des provinces. Quelques uns de ses membres n’ont pas dédaignés [sic] de prendre le titre d’associés dans ces compagnies ; elle peut en engager plusieurs à multiplier ces liens, dans touttes celles qui cultivent les sçiences. Les académiciens de Paris, associés aux académies des provinces, seront chargés d’entretenir des correspondances [4 v] avec elles, pour receuillir leurs productions, sous la forme cy dessus indiquée, ainsi que les observations locales, &c. Il en résultera que le secretaire perpétuel de L’acad. de Paris sera moins surchargé de détails, qui pourroient5Brouillon (f. 5v) : qui peuvent. dans la suite, se multiplier considérablement.

Il resteroit chargé, comme vous l’indiqués, monsieur, d’annoncer aux provinces, ce que sa correspondance avec les étrangers, lui auroit appris de nouveau, et de leur faire parvenir les plans sur lesquels il convient qu’elles travaillent uniformément, surtout pour les observations météorologiques, dont on ne tirera jamais d’importants résultats, si elles ne sont, générales, uniformes et suivies.

Voila, monsieur, les réflexions qu’a fait naitre votre lettre. Nous les soumettons entierement à vos lumieres. Elles n’ont d’autre but que le succès de votre projet, l’avancement et la gloire des sçiences. Heureux si nous pouvons concourir aux vues, vraiment patriotiques qui vous animent ; Vous y mettrés tous les talents ; nous offrons notre zéle.

J’ai L’honneur d’être avec une respectueuse considération, Monsieur, Votre tres humble et très obéissant serviteur,

Latourrette6Paraphe bouclé.

P.S. Oserois je vous prier, monsieur, de me rappeller dans le souvenir de M. D’alembert, et de lui présenter mon respectueux hommage7Ce post-scriptum est absent du brouillon..

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